Cineast(e)s
Le cinéma a-t-il un sexe? C’est ce qu’ont voulu savoir Julie Gayet et Mathieu Busson dans leur documentaire très instructif : Cinéast(e)s. Tellement cine-woman…
Le cinéma a-t-il un sexe? C’est ce qu’ont voulu savoir Julie Gayet et Mathieu Busson dans leur documentaire très instructif : Cinéast(e)s. Tellement cine-woman…
Christie Molia est productrice. C’est sa société Moteur, s’il vous plait qui a financé le documentaire Cinéast(e)s que Julie Gayet et Mathieu Busson ont réalisé sur la question du genre au cinéma. Au sens propre. C’est-à-dire : existe-t-il un cinéma féminin ? Entretien.
Gabrielle et Martin font partie des Muses, une chorale professionnelle. Ils préparent un spectacle public où ils accompagneront Robert Charlebois. Et puis Gabrielle et Martin s’aiment.
Rien que de très normal, sauf que Gabrielle et Martin sont déficients mentaux. Ce qui signifie que leur quotidien est organisé par leurs proches ou par leur institution, leur intimité aussi. Même s’ils apprennent à s’autonomiser, leur entourage ne semble pas prêt à accepter qu’ils se fréquentent et qu’ils s’aiment. Au fur et à mesure qu’ils se croisent chaque semaine pour chanter, leurs sentiments réciproques deviennent tellement forts qu’il semble de plus en plus impossible de les séparer.
La mère de Martin décide de mettre un terme à cette relation en empêchant son fils de venir aux répétitions. Gabriele, qui est vraiment amoureuse, commence à dépérir sérieusement, et à multiplier les comportements dangereux. Car, dans son cas, les filtres à émotion n’existent pas.
Sur le papier, le pitch est typiquement tout ce qu’on redoute de voir au cinéma. Sur écran, c’est autre chose. En filmant cette histoire comme un documentaire, en s’attardant avec tendresse sur ses personnages et sur leur quotidien compliqué, Louise Archambault réussit à déjouer tous les pièges qui semblaient tendus.
Là, au contraire, on s’attache tellement à Gabrielle et à sa détermination à pouvoir aimer Martin, que sa bataille pour la reconnaissance de son intimité, de ses sentiments devient un combat dans lequel on la soutient. A fond. Sa volonté de vouloir simplement aimer, comme quiconque, devient une conquête émouvante dans laquelle, à défaut de pouvoir l’aider, on se surprend à se refuser de la juger, voire à l’encourager dans la recherche de son bonheur.
C’est si vrai qu’on se moque même de savoir si Louise Archambault a travaillé avec des professionnels ou avec des amateurs, issus du centre où le film est tourné. Sa démarche est si sincère, qu’elle évite le pathos et le larmoyant pour laisser place à l’émotion vraie, comme quand Robert Charlebois vient rencontrer la chorale pour répéter une première fois avec elle. Un petit gars ben ordinaire qui leur fait faire un spectacle extraordinaire. Et touchant.
2013 – Canada – 1h44
Les autres films du 16 octobre chroniqués sur cine-woman :
Pour tous ceux qui auraient raté Le dernier Cercle, l’émission de critiques de cinéma présentée par Frédéric Beigbeder et diffusée le 4 octobre sur Canal+ Cinéma, en voici les extraits les plus marquants c’est-à-dire ceux où Cine-Woman était invitée à s’exprimer.
Les débats contradictoires ont commencé pour cine-woman avec La vie domestique d’Isabelle Czajka, peu soutenu par les critiques féminines. C’est le moins que l’on puisse dire.
Deuxième étape : Diana, descendue par la plupart mais soutenue par cine-woman
Enfin, troisième et dernier avis, sur Opium l’hommage baroque et toc d’Arielle Dombasle à Jean Cocteau, période Raymond Radiguet.
Tout commence lors un réveillon de premier de l’an au Palais de Justice de Paris. Ariane, une des juges appliquée, consciencieuse, un peu coincée même, est peu à peu aspirée par la spirale de la fête…On la retrouve quelques mois plus tard, au moment même où elle découvre, primo, qu’elle est enceinte, deuxio, que le père biologique de l’enfant qu’elle porte n’est autre que Bob, un criminel un peu bas de plafond, recherché pour un meurtre particulièrement atroce dont il se prétend innocent.
Mais, comment auraient-ils bien pu se rencontrer ? Comment Ariane a-t-elle pu se laisser aller à ce point-là ? Par hasard, Bob décide de profiter de la situation pour faire reconnaître son innocence… A ce contact, la juge s’adoucit.
D’habitude, un film de Dupontel est toujours une épreuve de résistance. Non pas que ses sujets soient inintéressants, au contraire, ni que ce qu’il dénonce ne soit sans aucun fondement. Non, mais ses personnages d’exclus de la société, survoltés et plongés dans des intrigues invraisemblables menées à 100 à l’h, sont souvent épuisantes à suivre. Et comme ils incarnent toujours ses héros, en multipliant les cabrioles et en accentuant le côté burlesque en forçant le trait, une certaine lassitude avait fini par s’installer.
Ici, tout change. Pour une fois, la vedette n’est pas Dupontel, mais une femme aux antipodes de ses personnages habituels : elle est plus qu’insérée dans la société, c’est même elle qui fait respecter les lois, elle n’a ni problème de reconnaissance, ni de misère sociale à traîner.
Et comme il a choisi Sandrine Kiberlain pour l’interpréter, elle qui manie l’humour comme un décalage, un décadrage plus que comme une performance spectaculaire, le contraste est aussi innovant qu’intéressant. Du coup, non seulement son comique gagne en profondeur et élargit sa palette (et le film est par moment vraiment très très drôle), mais l’omniprésence fatigante de Dupontel à l’écran est savamment compensé par l’élégance un peu gauche de sa colistière.
Du coup, on a enfin la quiétude nécessaire pour apprécier ce qu’il dénonce, et en prenant même le temps de savourer un mot d’esprit, une bonne réplique, un gag récurrent (celui de l’avocat bègue par exemple), un cameo ou une outrance qui, là, sans surenchère, finit par être bienvenue. Comme si Dupontel s’était calmé et se laisse enfin déguster.
2013 – France – 1h22
Les autres films du 16 octobre chroniqués sur cine-woman :
La vie d’Adèle d’Abdellatif Kéchiche a reçu la Palme d’or au Festival de Cannes 2013. Mérité et superbe. Bravo!
Dans les années 1980, New York n’était pas encore la ville ultra-chic qu’elle est devenue aujourd’hui. Il y avait encore des cireurs de chaussures, des joueurs de backgammon et des sans-abris qui passaient le plus clair de leurs temps dans la rue, donnant à la ville une animation très particulière, été comme hiver.
Le film réalisé et interprété par Charles Lane raconte cette époque. Il joue un artiste des rues, établi aux alentours de Washington Square, qui assiste dans une ruelle désaffectée au meurtre d’un homme, papa d’une fillette.
Le peintre recueille l’enfant et, alors que sa propre vie n’est déjà qu’une véritable survie, il va se débrouiller pour prendre soin de la petite, la protéger du froid intense qui les mord tous les deux, la nourrir, l’habiller et surtout la chérir. Ce couple d’errants étonnant dans la ville suscite de drôles de rencontres.
De toute évidence, ce film muet, tourné dans un noir et blanc magnifique, lumineux, et tourné dans la rue par un hiver glacial parmi les sdf, est un hommage appuyé au Kid de Chaplin. Sauf qu’il décrit une époque pas si lointaine, où la pauvreté était galopante, la solidarité des exclus une réalité et le besoin de protéger et d’aimer une valeur signifiante. Est-ce toujours le cas aujourd’hui ?
1989 – USA – 1h38
En partenariat avec Grains de Sel
Les autres sorties du 9 octobre sur cine-woman : Prisoners de Denis Villeneuve, La vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche, la Palme d’or de Cannes 2013, le dernier Disney, Planes et le beau premier film Vandal d’Hélier Cisterne.
Sept ans après Cars, voici Planes, l’histoire copiée-collée et moins inspirée de Dusty, un épandeur chargé de répandre à basse altitude les engrais et les insecticides sur les cultures.
Dusty se rêve en avion de haut vol, en as de la vitesse. Un défi qu’il va relever lors du Grand Rallye du Tour du ciel.
Evidemment, les obstacles seront nombreux, le découragement omniprésent mais grâce à l’amitié indéfectible de ses amis et à sa ténacité, Dusty va réussir à prouver au monde entier qu’on peut triompher de tout à condition de le vouloir vraiment.
C’est attachant et plutôt bien mené comme toujours chez Disney, avec une succession bien rôdée d’aventures, mais sans aucun effort de renouveler une recette qui fonctionne tout seule. Déjà vu donc.
2013 – USA – 1h32
En partenariat avec Grains de Sel
Les autres sorties du 9 octobre sur cine-woman : Prisoners de Denis Villeneuve, La vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche, la Palme d’or de Cannes 2013, Vandal, le beau premier film d’Hélier Cisterne et la magnifique reprise Sidewalk Stories de Charles Lane.
Dans une banlieue banale d‘une ville américaine, le soir de Thanksgiving, Anne et Joy, deux amies de 6 et 7 ans disparaissent. La police arrête très vite un coupable idéal qu’elle relâche faute de preuves. Le père d’Anna décide de prendre les choses en main. A sa manière… La police, elle, continue son travail de fourmi.
Faire vite quitte à mal faire. Voilà à peu près la devise de Keller, le père d’Anna, interprété toute en puissance par Hugh Jackman. « Au bout d’une semaine, les chances de retrouver un enfant disparu diminuent de moitié, au bout d’un mois, il n’y en a pratiquement plus aucune de le retrouver vivant. Alors, excusez-moi de faire tout ce qui est en mon pouvoir » est une des vindictes qu’il adresse au policier, l’inspecteur Loki, joué par Jake Gyllenhaal, un type brillant mais introverti qui, bien évidemment, enquête en restant dans les clous de la loi.
Le nouveau film du québécois Denis Villeneuve, réalisateur chic qui a marqué les esprits avec « Polytechnique » et surtout « Incendies », est d’abord celui de ce duo, de ces deux hommes unis par hasard sur une même cause mais avec des méthodes opposées. Ils se détestent ou à peu près et ne pourront sans doute jamais se comprendre, ni s’apprécier. Mais, il faut faire avec.
C’est aussi un thriller sombre, presque glauque qui surfe sur les thèmes délicats des enlèvements d’enfants, de la pédophilie, des angoisses parentales etc… avec comme volonté d’impliquer le spectateur en lui disant : « ne jugez pas mais demandez-vous plutôt ce que vous auriez fait à leur place».
Eux, ce sont les parents ou plus exactement les pères de deux fillettes. Les mères, elles, se sont réfugiées dans le silence ou au fond de leur lit, complètement groggy aux barbituriques, complètement incapables qu’elles sont de réagir à une telle tragédie. Bizarre… Le père de Joy fait à peu près confiance à la police, même s’il assiste un peu involontairement Keller, un croyant impulsif, sûr de son bon droit, prompt à se faire justice lui-même, quitte à pulvériser ce qui lui reste de famille et à se détruire lui-même. Une tête brûlée aux intuitions pourtant assez justes.
On erre donc avec eux et ce policier solitaire au gré de leur enquête dans le rayon très limité d’une petite ville de province américaine, entre son commissariat, les maisons des uns et des autres et la forêt voisine.
L’ambiance est immédiatement campée. Quasiment toute l’enquête se déroule la nuit, dans le noir et sous une pluie battante. Quand ce n’est plus le cas, l’atmosphère est glaciale (il neige même parfois) et les maisons de banlieues semblent toutes un peu mal entretenues, un peu délaissés et filmées sans espace, frontalement. De même, la solitude quasi totale du policier fait face à l’isolement des familles dans la douleur, comme si, plus rien ne pouvait les atteindre. Et petit à petit l’étau se resserre autour d’un possible meurtrier, au gré de fausses pistes et de rebondissements qui finissent par se succéder dans une surenchère contre-productive.
A force de vouloir dissimuler puis retarder la résolution, le film n’en finit plus – il dure 2h33 !- et perd en réalisme, en émotion en nous forçant à supporter l’énième étape d’une intrigue à tiroirs. On en sort rincé, essoré même avec cette sensation intense que moins de surenchère dans l’horreur et dans les multiples personnes impliquées à tort ou à raison aurait été bénéfique à cette histoire. La pluie, le froid en moins, Incendies, le film précédent de Denis Villeneuve avait déjà ce défaut.
S’il s’est un peu calmé dans le léchage de l’image qui le caractérisait à ses débuts (Maelström ressemblait à une longue pub pour parfum), il compense désormais par une accumulation de situations, de sous-énigmes. Dès qu’il apprendra l’art de l’épure, Denis Villeneuve sera un grand réalisateur.
2013 – USA – 2h33
Les autres sorties du 9 octobre sur cine-woman : La vie d’Adele d’A Kechiche, la Palme d’or de Cannes 2013, Vandal film frais pour ado d’Hélier Cisterne, le dernier Disney, Planes et la magnifique reprise Sidewalk Stories de Charles Lane.
Chérif, 15 ans, traverse une adolescence difficile. Avant qu’il ne bascule inéluctablement dans la délinquance, sa mère débordée se résout à l’envoyer chez sa sœur à Strasbourg, où le père de Chérif vit depuis leur divorce. Non pour l’éloigner, mais pour protéger son petit frère.
Une famille structurante, un oncle autoritaire, un cousin de son âge, son père à proximité, Chérif semble armé pour réussir son CAP de maçonnerie. Sauf que Thomas, le cousin, cache un secret : la nuit,il « graffe ». Il risque sa vie pour recouvrir les murs de la ville de dessins et de lettrages. Un soir, il emmène Chérif avec lui qui découvre ainsi un nouveau moyen d’exorciser sa violence.
C’est un film simple, concentré et parfaitement tenu qui raconte le destin d’un adolescent turbulent. Sans jugement, mais avec une dynamique étonnante, ce premier long métrage se vit comme un arc tendu prêt à rompre à chaque instant tout en nous envoyant dans un ailleurs, le monde nocturne, feutré et périlleux des graffeurs où il est primordial de se faire un nom et de défier les lois de la gravité. A ses risques et périls. Mais, l’adolescence peut-elle être vécue sans se frotter au danger ? C’est en s’y risquant que Chérif (formidablement joué par le jeune Zinedine Benchenine) deviendra un homme complet, sensibilité et sans doute plus responsable.
2013 – France – 1h24
En partenariat avec Grains de Sel
Les autres sorties du 9 octobre sur cine-woman : Prisoners de Denis Villeneuve, La vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche, la Palme d’or de Cannes 2013, le dernier Disney, Planes et la magnifique reprise Sidewalk Stories de Charles Lane.