Les filles au Moyen-âge
Petit budget mais grande idée, ces filles au Moyen-âge dressent un portrait intelligent de la condition féminine à travers les âges. Sans moyen mais avec talent. Brillant!
Petit budget mais grande idée, ces filles au Moyen-âge dressent un portrait intelligent de la condition féminine à travers les âges. Sans moyen mais avec talent. Brillant!
Vendue comme une bande de filles, ce nouveau film de Céline Sciamma consacrée encore une fois à l’adolescence féminine, est surtout l’histoire d’un destin brisé, celui d’une jeune fille qui s’est brûlée les ailes. Raté donc.
Grandie à la Cité des 4000 de La Courneuve sans père mais dans une vraie famille juive, violentée et insultée par son beau-père, Sylvie Ohayon s’en est sortie grâce à son goût des mots, des livres et des études. Après une riche carrière dans la pub, elle écrit l’histoire de son enfance « Papa was not a Rolling Stone » , son premier livre publié en 2011, qu’elle adapte aujourd’hui en film.
Dans la pub, je faisais tout le temps des titres. Mais,quand il a fallu titrer mon livre, j’étais bloquée. Un ami m’a dit : « ton père, c’était pas un Rolling Stone ! ». Et c’est le moins qu’on puisse dire ! Non seulement il m’était inconnu, mais il n’était pas rock n’roll.
Si, on l’entend au début du film…
Euh… Si, bien sûr, je le disais dans le livre que mon père était un prisonnier au long cours…
La réalité était plus intense, donc moins crédible. Oui, c’est mon histoire que j’ai criée, expulsée quand j’étais au plus bas, en plein divorce et sans boulot. C’est mon second mari qui m’a poussée à « cracher mon histoire en la camouflant sous le désinfectant roman ». Ca a été salvateur.
Quand j’ai fini de l’écrire, je suis allée voir Stella de Sylvie Verheyde, un film qui m’a bouleversée. Je lui ai envoyé mon manuscrit pour qu’elle le lise et s’il lui plaisait, qu’elle adapte au cinéma. Elle a accepté de m’aider mais pas de le réaliser. Et m’a dit que j’étais folle de vouloir confier mon histoire à quelqu’un d’autre. Elle a participé au scénario, au casting et je l’ai appelé tous les soirs du tournage…
Elle m’a surtout aidée à révéler mes sentiments et mes émotions. Elle m’a appris à lâcher prise, à laisser couler la sève et le sang. La technique est un faux problème. Il faut surtout un point de vue et de la volonté. J’ai tenu à tourner en 35mm, à l’ancienne, sans caméra numérique, comme dans les années 1980 durant lesquelles le film se passe.
Pas du tout ! J’ai un rapport tellement fort à la langue –j’en parle dans mon deuxième livre d’ailleurs – que je peux vous assurer que toutes les expressions utilisées l’étaient à l’époque. A la Courneuve, on disait déjà relou, rebeu, mytho, mythologue. Chez nous, la langue était plus libre, plus fleurie. Ces mots se sont diffusés et ont ensuite été rattrapés par Paris, comme le Verlan dans les années 1960.
C’est difficile à dire. Je sais que dans la pub, j’ai vraiment été recrutée sur mon cul. Ca a été une claque, moi qui avais tout misé sur mes diplômes ! Mais, je ne suis pas sûre qu’en banlieue, il y ait un déterminisme sexuel. Kamel –Ouali – s’en est bien sorti par la danse.
Moi, j’ai surtout tenu à montrer des filles qui font des études, qui ont une sexualité normale, qui tombent amoureuses. A mon époque, les rebeu, les juives, les autres, on portait de shorts, on chantait dans la rue. C’est vrai qu’il ne fallait pas dire qu’on couchait, les filles se faisaient recoudre, mais on avait le droit d’aimer. Aujourd’hui, c’est plus compliqué : tout s’est radicalisé et paupérisé. Le voile a fait son apparition, des migrants qui ne parlent pas français sont arrivés. Or, la langue était notre lien intercommunautaire.
Souvent ! J’en suis partie à 26 ans. Mais, je vais voir ma mère et ma grand-mère tous les week-ends et je suis restée amie avec mes copines d’enfance.
Du coup, je n’ai pas eu de limite. Je n’ai pas eu de figure d’autorité. J’ai bâti mes propres cadres, qui sont très cohérents avec ce que je suis vraiment.
Oui, il était violent, me tapait et m’insultait tout le temps. Mais, ça glissait sur moi, parce que justement, ce n’était pas mon père. Et avoir lu Fitzgerald m’a sauvée : « Aie une bonne vie, ce sera ta meilleure revanche »
Ecrire des livres, c’est déjà tendre la main. La seule chose que j’enseigne, c’est que quand on te fout à terre, il faut te relever. Avance, donne-leur tort. Fitzgerald, encore. La vengeance n’est jamais gagnante, la revanche, si.
J’ai un contrat pour adapter mes deux livres, Les Bourgeoises et Bonne à (re)marier, au cinéma. En janvier, sort mon quatrième livre, L’une contre l’autre, une fiction qui parle du racisme anti-français dans les cités et j’ai déjà commencé à écrire le cinquième.
Lire la critique Papa was not a Rolling Stone.
Les BD (six tomes) ont été un vrai succès auprès des fillettes. Lou est une jeune fille de son époque, épanouie, un brin originale et élevée par une célibataire mère complètement loufoque.
Dans le premier tome, « Journal intime » qui est ici adapté au cinéma par son auteur et dessinateur, Julien Neel, Lou présente sa famille (notamment sa grand-mère revêche), sa vie quotidienne, se dispute avec Mina, sa meilleure amie, se lie avec une autre, est toujours amoureuse de Tristan à qui elle ose enfin parler et jette sa mère dans les bras de leur nouveau voisin.
Fidèle à son personnage, Julien Neel a pourtant opté, non pas pour un film animé, mais pour une fiction avec des acteurs bien vivants. Si la jeune inconnue Lola Lasseron est une charmante découverte, les autres acteurs forcent tous le trait et tombent dans une surenchère insupportable des travers de leurs personnages.
Ludivine Sagnier est méconnaissable et complètement à l’ouest, Nathalie Baye, la grand-mère, trop austère, le voisin Kyan Khojandi insignifiant… Les décors, les situations sont tellement décrites sans nuances que le film devient vite un gâteau beaucoup trop sucré et donc indigeste.
2014 – France – 1h44
En partenariat avec Grains de Sel
Umber Singh, le père d’une famille bourgeoise indienne et sikh, a déjà trois filles. Sa femme est à nouveau enceinte et il est impensable qu’elle mette au monde une autre fillette.
Umber veut un fils pour restaurer l’honneur qu’il a déjà perdu en abandonnant sa maison et en fuyant son village, lors de la partition de l’Inde et du Pakistan en 1947. L’enfant nait fille, mais Umber décide de cacher son sexe à tous et de l’élever comme un garçon. Il parvient même à le marier. Mais à quel prix ?
Ce film dur, teinté d’exil, de mort et de malheurs, traite simplement de sujets très forts : le poids des traditions, notamment celle de l’honneur, l’identité sexuelle, l’autorité toute puissante du père et le traumatisme de la partition de l’Inde en 1947, souvent abordée dans le cinéma d’auteur indien.
Mais, les spectateurs enfants et adolescents seront sans doute surtout intéressés ou troublés par le fait d’avoir été élevé dans le déni de son sexe de naissance. Cette histoire, inspirée par des coutumes locales et l’expérience du réalisateur Anup Singh, est très maitrisée dans sa première partie plus narrative. Elle est moins compréhensible à la fin, quand les fantômes reviennent hanter les jeunes mariés en proie au doute et au choix de leur destinée, de toute façon malheureuse.
2013 – Inde – 1h49
En partenariat avec Grains de Sel
Difficile d’y échapper tant la promo du premier film d’Audrey Dana réalisatrice à été intense. Alors qu’attendre de cette énième film de femme, annoncé et revendiqué comme tel?
Rien, ou pas grand chose. Car, le moins que l’on puisse dire c’est qu’on n’y apprend rien, ni sur le comportement des femmes, ni sur celui des hommes (particulièrement falots ici).
Le principe est simple. En onze personnages (une équipe de foot!) qui s’entrecroisent plus ou moins, chacun étant porté par une star d’Isabelle Adjani à Vanessa Paradis en passant par Sylvie Testud ou Alice Taglioni -, Audrey Dana, elle aussi au casting mais pas dans le rôle le plus sympathique, pense dresser un portrait de la femme d’aujourd’hui, dans lequel on devrait se reconnaître AB-SO-LU-MENT.
Premier écueil : : va-t-on au cinéma pour retrouver sa vie sur grand écran? Pas sûr.
Deuxio : les caractères de ces personnages sont dessinés à tellement gros traits qu’il est impossible de s’identifier. Que dire de la mère de famille débordée qui plaque son mari et ses gosses pour vivre une passion avec la baby-sitter? Ou alors les diarrhées répétitives de Laetitia Casta dès qu’elle tombe amoureuse? Sans parler de l’idylle de la plouc du coin avec la méga-star interplanétaire?
Si le film avait été réalisé par un homme, on l’aurait sans doute traiter de mizogyne. On passera élégamment sur l’humour même pas potache mais carrément vulgaire, niveau pipa-caca de nombreuses scènes.
Avec un casting et une promo pareils et surtout une telle promesse, on était en droit d’attendre que ce film révolutionne justement la comédie de femmes pour les femmes. Au contraire, il enfile les clichés, les conventions, les maladresses et le mauvais goût. Et ce sont pas les quelques audaces – la scène du tampon en ouverture – ou le guilleret flashmob de la fin qui sauvent la mise.
2014 – France – 1h58
© Luc Roux
Un vent de fraîcheur souffle sur le jeune cinéma français. Est-ce parce que Lola Bessis et Ruben Amar, couple à la ville et co-réalisateurs, ont pris le large à New York et eu la bonne idée de réaliser leur premier film là-bas? En partie. Leur petite fable a un charme fou, la liberté des vrais films indies américains et sans les défauts, ni l’arrogance habituels des premières oeuvres françaises.
Sur le papier, le récit semble pourtant déjà vu et pas très profond. Lilas (Lola Bessis) se rêve artiste. Elle est jeune, naïve, pas tout à fait sûre de ses talents et complètement sous la coupe d’une mère autoritaire et castratrice, très reconnue dans le milieu de l’art contemporain. Mais, Lilas a décidé de lui dire non. Pour la première fois, et donc de rester à New York quoiqu’il lui en coûte.
Sans argent, elle erre avec sa valise et ses créations en cours à New York et tombe au hasard de ses rencontres chez Leeward et Mary, un couple en crise. Mary en a marre de se crever à faire bouillir la marmite et faire vivre la famille (ils ont une petite fille baptisée Rainbow ou Maggie, tout dépend) tandis que son musicien de mari est en plein doute existentiel et créatif.
Parviendra-t-il à enfin enregistrer une de ses oeuvres composées sur les jouets de sa fille et autres instruments minuscules et bizarres? Lilas arrivera-t-elle à s’émanciper de sa mère et à créer son propre univers créatif?
Que leurs objectifs soient atteints ou pas, n’a finalement pas d’importance. C’est leur rencontre qui est intéressante, charmante, captivante. Lilas et Leeward se comprennent illico, sans ambiguité et de leur fusion spirituelle, naîtra l’énergie créatrice dont ils avaient tant besoin. Celle qui leur permettra d’affronter leurs peurs et leurs doutes et d’assumer ce qu’ils sont.
Dans un univers qui n’appartient qu’à eux, avec une foule de personnages improbables et de scènes amusantes qui donnent un relief singulier à cette histoire, avec aussi un rythme particulier, ce film est une véritable bulle de légèreté, une sorte de feel good movie d’un genre nouveau, des plus agréables à regarder. A découvrir sans tarder…
2013 – France – 1h35
Peut-être vous souvenez vous de ce fait divers, l’affaire Fortin. Deux frères de 18 et 16 ans ont été retrouvés en 2009 en Haute-Ariège après une cavale de 11 ans auprès de leur père. Celui-ci ne les avait jamais rendu à leur mère après des vacances et personne n’avait depuis retrouvé leur trace.
Le premier film de Jean Denizot imagine justement leur sortie de la vie clandestine. Quand et comment ont-ils pu, dû échappé à la vigilance, à l’autorité, à la manipulation de leur père ?
Doucement, selon lui, et c’est l’amour et/ou la sexualité qui décidera de leur sort. Le fils aîné disparaît assez tôt du récit, tandis que le jeune frère, dans une ultime tentative de sauver son père (qui se sait condamné par la justice), va devoir attendre de tomber amoureux pour enfreindre la loi paternelle. Perdue pour une femme (leur mère) mais aussi sauvée par elles (leurs amoureuses).
Road-movie clandestin et campagnard, ce film brille surtout par une prise de vues superbe, qui magnifie constamment les paysages traversés, qu’il s’agisse des Pyrénées ou des bords de Loire.
Les acteurs peu connus, Zacharie Chasseriaud, Solène Rigot, Nicolas Bouchaud, sont eux aussi remarquables, mais c’est quand même l’ode à la nature qui démarque ce film de la production habituelle.
2013 – France – 1h33
Après Harry Potter, Twilight, voici la nouvelle saga qui va s’imposer auprès des adolescentes! Ecrits par Veronica Roth, les livres étaient déjà des best-sellers aux Etats-Unis (pas en France) avant que le premier épisode en s’installe en tête du box-office US dès sa sortie. Est-ce mérité? Plutôt oui, parce que l’intrigue est intéressante, intelligente même, riche en rebondissements et portée par une héroïne pleine de ressources.
Après une guerre particulièrement destructrice, la vie à Chicago a complètement changé. Sa population est désormais organisée en 5 factions qui se répartissent la gestion et le gouvernement de la cité. Pour Béatrice, c’est le grand jour. A 16 ans, elle va choisir demain la faction à laquelle elle appartiendra.
Elevée chez les Altruistes, elle se vit comme une Audacieuse, cette sorte de milice interne qui doit protéger tous les habitants de Chicago. Elle rompra alors définitivement avec sa famille…
Pourtant, les tests auxquels on la soumet sont loin d’être concluants : elle est une Divergente, une espèce qu’aucune faction ne reconnaît et dont tous se méfient. Mieux vaut donc que personne ne le sache… mais combien de temps pourra-t-elle dissimuler sa vraie nature ?
La force de « Divergente » est de mêler l’aventure personnelle de cette jeune femme avec le destin de la cité où elle habite. Du coup, on est immédiatement plongé au cœur d’une ville familière mais si meurtrie qu’elle s’est dotée d’une organisation ultra-rationnelle pour renaître de ses cendres.
Ce mélange entre réalité et légère anticipation fait rapidement prendre conscience du danger de la déviance. Mais aussi de sa nécessité. Portée avec brio par la jeune Shailene Woodley, ce véritable film d’action portée par une intrigue judicieuse et une histoire d’amour intense se laisse regarder avec intérêt malgré quelques incohérences de scénario. Mais, on attend même la suite avec impatience…
2014 – Etats-Unis – 2h06
Fille de botaniste, Tante Hilda, une écolo-bobo un peu folle, vit dans un petit paradis, une sorte de forteresse haut perchée sertie par un vaste écrin de fleurs et de verdure.
Une équipe de chercheurs vient de mettre au point une nouvelle céréale, qui se cultive avec peu d’eau et sans engrais. Au départ, tout le monde s’en réjouit. Grâce à cette plante, la faim dans le monde pourrait être éradiquée et son énergie remplacerait le pétrole. Mais, sa prolifération devient incontrôlable. Que va devenir la serre d’Hilda ? Et notre planète ?
Tante Hilda, la dernière création de Jacques-Rémy Girerd, s’inscrit dans la droite ligne de ses productions précédentes « Ma petite planète chérie », « Mia et le migou » ou « La prophétie de grenouilles », le message écologique n’étant plus un alibi mais bien le thème central du film.
Dommage qu’il soit porté par des adultes fantasques, loufoques, à la limite de la caricature. Comme le trait du dessin, qui joue en permanence sur l’outrance et le vide.
Tout cela empêche l’identification des jeunes spectateurs et enlève de la crédibilité à une cause à laquelle ils sont sensibles et qu’ils devraient apprendre à défendre immédiatement et sans compromis !
2013 – France – 1h29
En partenariat avec Grains de Sel