How to have sex

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Trois lycéennes anglaises partent pour une semaine de fête dans une station balnéaire de Méditerranée. Au programme : sexe, drogues et alcools ! How to have sex de Molly Manning Walker qui traite des limites traumatisantes de cette débauche a reçu le prix Un Certain Regard au Festival de Cannes 2023. 

Zones grises

Elles ont jeunes, vives et déterminées à passer du bon temps. Pour leurs premières vacances entre copines, Tara, Skye et Em ont un programme établi : boire, s’amuser et baiser, si possible. Chaque jour, elles ont un programme chargé : s’habiller le plus sexy possible pour sortir dans des bars et boites immenses, acheter des boissons alcoolisés, élaborer des stratégies pour rencontrer des garçons… 

How to have sex de Molly Manning Walker - Cine-Woman
Lara Pyke (Skye), Enva Lewis (Em) et Mia McKenna-Bruce (Tara), 3 copines en vacances seules pour la première fois

Sur le papier, Tara semble la plus délurée. Très extravertie et déterminée à tout oublier dans la fête, elle sympathise avec son voisin de balcon et tombe peu à peu sous son charme. A vrai dire, Tara n’a qu’un but avoué : perdre sa virginité à tout prix. 

How to have sex in the rudest way

Mais, durant cette semaine de folie où tout est permis, et surtout de se mettre minable, ni les sentiments, ni la pudeur ne font le poids face au collectif. De soirée en soirée, Tara va être confrontée à une surenchère permanente largement entretenue par une foule avide de dépasser les limites. Sans qu’elle le veuille vraiment et sans qu’elle puisse dire clairement non, Tara se retrouve à coucher avec un type qu’elle ne convoitait pas. Lui n’a aucune conscience d’avoir franchi cette zone grise, celle de son consentement. Mais, il a pénétré les limites personnelles de Tara. La fin du séjour et le retour en Angleterre laisseront à la jeune femme un goût plus qu’amer. 

How to have sex de Molly Manning Walker - Cine-Woman
Mia McKenna Bruce (Tara) et Shaun Thomas (Badger)

Dans Spring breakers d’Harmony Korine, qui, dans un contexte similaire, raconte aussi des abus sexuels sur jeunes filles sexy, les victimes finissaient par se venger en prenant les armes. Rien de tel, ici. Molly Manning Walker les laisse au contraire avec leur trauma et la gueule de bois. Pourquoi et comment en suis-je arrivée là ? , semble se demander Tara, qui n’a rien vu venir.

Le consentement

2000 ans de patriarcat, l’impunité dont continuent à bénéficier les hommes, le non-respect d’un consentement actif… ne lui seront d’aucun secours. Or, c’est de ça dont il s’agit pourtant ici, de cette fameuse zone grise où il est si difficile de se faire respecter quand on est une fille et de respecter quand on est un garçon. Surtout quand l’alcool, les drogues et la terreur de passer pour la coincée du coin incitent les filles à ne pas s’écouter tandis que les garçons sont encouragés à se comporter sans scrupules. 

How to have sex de Molly Manning Walker - Cine-Woman
Enva Lewis (Em) et Mia McKenna-Bruce (Tara)

Molly Manning Walker est si juste que son film n’est pas forcément assez explicite pour être bien compris. C’est sa subtilité, sa force donc, qui ont été saluées du prix Un certain Regard du Festival de Cannes 2023, mais sans doute aussi sa faiblesse. Il faut déjà être au courant et convaincue – soit pour l’avoir subi, soit par bonne connaissance du sujet – pour bien saisir où et quand se glisse l’enjeu qui se joue pour Tara. Beaucoup, parce que la limite personnelle des filles reste indicible, ne le comprendront pas. C’est justement tout l’intérêt du propos de la réalisatrice, de se glisser dans ces interstices et d’en révéler les traumas à postériori. 

How to have sex de Molly Manning Walker - Cine-Woman
Mia McKenna-Bruce interprète Tara, désenchantée

Pour cela, How to have sex s’appuie le talent et la personnalité hors normes de la jeune Mia McKenna-Bruce, qui crève littéralement l’écran, à la fois par ses débordements lorsqu’elle est extravertie et par la tristesse qui l’envahit quand elle comprend qu’elle a été trompée sur ses intentions. La bande de jeunes qui l’entoure est à l’unisson mais moins charismatique. Reste une question en suspend : comment en est-on arrivé à ces débauches collectives, à ces jeunes foules en liesse avides de toujours plus d’alcool, de drogues et de sexe, à ces orgies et abus en tout genre qui finissent par n’avoir plus aucun lien avec la fête, même exutoire, mais seulement avec l’irrespect des uns et la surenchère permanente des autres ? Où l’individu s’épanouit-il et se construit-il ici ? Les anglo-saxons ont la réputation d’être en avance sur le sujet, mais les latins, même s’ils semblent un peu moins à la solde du collectif sur le sujet, – il n’y a pas, à ma connaissance, de lieux dédiés comme c’est le cas pour les jeunes anglais ou allemands à Majorque par exemple ou dans d’autres îles de Méditerranée –  n’ont sans doute rien à leur envier. Malheureusement.

De Molly Manning Walker, avec Mia McKenna-Bruce, Samuel Bottomley, Lara Peake…
2023 – Royaume-Uni – 1h28

How to have sex de Molly Manning Walker a reçu le Prix Un certain Regard 2023 au Festival de Cannes, remis par un jury présidé par John O’Reilly et dans lequel officiait Alice Winocour, prix Alice Guy 2023. 

© nikolopoulos_nikos
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