Vierge sous serment

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Quelles formes prend la féminité? C’est en substance ce que se demande la réalisatrice italienne Laura Bispuri. Dans son premier film Vierge sous serment, elle interroge brutalement l’identité sexuelle à travers le Kanun, une tradition toujours en cours dans les montagnes reculées du nord de l’Albanie et aux alentours.

La féminité sous toutes ses formes 

Apparu au XIVeme, le Kanun est un code d’honneur à plusieurs facettes : il autorise la vendetta entre clans adverses et offre aux femmes qui en font le serment la possibilité de vivre comme un homme. Elles peuvent travailler, gérer un troupeau, fumer et porter une arme à la condition de renoncer à tout ce qui les « faisait » femme : leur nom, leurs formes et leur sexualité.

Alba Rohrwacher dans Vierge sous serment
Alba Rohrwacher dans Vierge sous serment

Hana (Alba Rohrwacher), devenu Mark, a fait ce choix. Sa sœur, Lila (Flonja Kodheli), a préféré fuir pour vivre pleinement sa vie de femme, épouser l’homme qu’elle aimait et gérer son existence loin de ces codes ancestraux. D’ailleurs, depuis qu’elle vit à Milan, Lila n’a jamais pu revenir en Albanie, ni revoir sa famille.

Vierge sous serment : un serment d’homme mais la femme veille

A la mort de leurs parents, Hana/Mark décide de renouer avec Lila. Elle débarque donc sans prévenir à Milan et découvre d’autres codes qui finissent par réveiller la femme qui est en elle et à laquelle elle avait choisi de renoncer.

Flonja Kodheli et Alba Rohrwacher dans Vierge sous serment
Flonja Kodheli et Alba Rohrwacher

Pour son premier film, Laura Bispuri a certes opté pour une histoire forte mais confidentielle. Si elle s’applique à expliquer de manière non littérale le Kanun, par un montage parallèle qui oppose l’enfance des deux sœurs, à leur vie adulte, elle n’oublie pas d’en traiter les effets les plus intimes sur celles qui ont opté pour.

Quelle féminité ?

Son film, certes un peu scolaire, un peu appliqué, a le mérite d’interroger sans relâche et sous diverses formes, la féminité. Un sujet crucial en Italie où la représentation de la femme est, plus qu’en France, basée sur l’apparence, sur l’exigence d’un physique soigné et entretenu, extrêmement codifié.

Alba Rohrwacher dans Vierge sous serment
Alba Rohrwacher

Pour cela, elle a imaginé que la fille de Lila, Jonida, a tellement intégré les codes de la société italienne qu’elle pratique à outrance la natation synchronisée, un sport où le maquillage, la féminité fabriquée comptent presque plus que la performance !

Un problème d’identité

Une très belle idée qu’elle confronte sans relâche à la masculinité bousculée d’Hana/Mark et qui laisse supposer qu’à partir du moment où une identité sexuelle est fabriquée, elle finit souvent par être mal assumée. Intéressant.

De Laura Bispuri, avec Alba Rohrwacher, Flonja Kodheli, Lars Eidinger, Stjefen…

2015 – Italie/Albanie – 1h27

Vierge sous serment a été sélectionné à la Berlinale 2015 et primé dans de nombreux festivals internationaux.

Lire aussi le portrait de Flonja Kodheli, actrice albanaise francophone.

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