C’est ça l’amour

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C’est ça l’amour ? Attendre le retour de sa femme, aider ses filles à grandir ou avoir envie d’embrasser quelqu’un ? Un peu tout ça, selon Claire Burger, la réalisatrice qui signe ici son deuxième long métrage.

L’amour grand angle

De quel amour parle Claire Burger? De l’amour d’une homme et d’une femme dont on comprend qu’ils viennent de se séparer sans se le dire ? L’amour qu’un père porte à ses enfants ? De celui qu’un mari éconduit porte encore à sa femme ? Que des jeunes filles découvrent avec l’adolescence ? Ou bien de celui bientôt à venir ?

C'est ça l'amour de Claire Burger - Cine-Woman
Mario (Bouli Lanners) entourée de ses deux filles Niki (Sarah Henochsberg) et Frida (Justine Lacroix) sous l’oeil bienveillant de sa femme Armelle (Cécile Remy-Boutang, de dos)

Le film commence pourtant par un désamour. Armelle, régisseuse dans un théâtre,  a pris le large. Mario l’aime toujours et accepte par amour de gérer la maison et leurs deux filles. Le temps qu’elle revienne. Mais, les non-dits, l’absence de communication laissent cette situation en suspens. Mario gère comme il peut, pétri dans son chagrin et dans l’adolescence de ses filles.

L’indépendance, c’est ça l’amour? 

L’aînée, Niki, comprend cette quête d’indépendance, elle qui la souhaite pour elle-même. Pour Frida, la plus jeune, c’est beaucoup plus difficile. Sa mère lui manque. Son père la frustre.

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Le père (Bouli Lanners) regarde sa fille aînée Niki (Sarah Henochsberg) s’émanciper.

Deux évènements vont pourtant aider cette famille unie mais brutalement éclatée à accepter cette situation et à se ressaisir. Mario va s’inscrire à une formation de deux mois durant laquelle les confidences échangées donneront lieu à un spectacle. Frida va libérer la parole de son père et retrouve ainsi les marques d’affection familiales qui lui manquent tant.

Un homme meurtri mais mélomane

Ce qui est perspicace dans C’est ça l’amour, c’est la manière dont Armelle, la femme, apparaît si peu à l’écran alors qu’elle est dans toutes les têtes. Son mari la poursuit, elle passe son temps à l’éviter. Elle manque à ses filles. Son absence perturbe leurs vies, profondément.

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Le père perdu: l’excellent Bouli Lanners

Et Bouli Lanners est extrêmement touchant, en homme meurtri qui n’arrive pas à en vouloir à sa femme dont il attend le retour patiemment, et en père complètement dépassé par les évènements et l’adolescence. Il est très affecté par ce départ. Sa vulnérabilité le rend maladroit. Il se ressource grâce à la musique classique, souvent lyrique. La trouvaille la plus originale et la plus forte du film.

Du cinéma du réel

En revanche, on ne saura rien ou très peu des aléas, des errements de la mère qui, certes, a pris la décision mais est ensuite contrainte de gérer une partie des dégâts qu’elle a causés. Aucune psychologie ne vient expliquer son personnage, à peine une scène de déjeuner avec ces filles qui se finit mal, comme il se doit. Elle se dédouane mais ne laisse rien paraître de ses affects.

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Deux soeurs adolescentes face au départ de leur mère et au désarroi de leur père

Le cinéma de Claire Burger est naturaliste. Elle emprunte au documentaire et filme sa ville, Forbach et les lieux sans filtre, mais pas de front et sans contexte. Son premier long co-réalisé avec Marie Amachoukeli et Samuel Theis, Party Girl, avait été salué du Prix d’Ensemble Un certain Regard et de la Caméra d’or 2014. Elle en reprend le même principe : suivre au plus près et dans l’intimité quelques personnages.

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Un père et ses deux filles en train d’éteindre l’incendie qui a mis le feu à leur vie

De son propre aveu, C’est ça l’amour est moins spectaculaire car il s’intéresse à la classe moyenne quand Party Girl était plus populaire. C’est vrai et c’est une originalité du film. Mais, cela ne lui ôte pas un côté misérable que les enjeux affectifs ne comblent pas. Mais, qu’en revanche, la bande originale, superbe, finit par enjoliver. Tout comme ce spectacle-confessions qui offre les plus belles images de liberté et d’évolution du personnage, et donc de la situation.

De Claire Burger avec Bouli Lanners, Antonia Buresi, Justine Lacroix, Sarah Henochsberg, Cecile Remy-Boutang…

2018 – France – 1h38

C’est ça l’amour de Claire Burger a reçu le prix Feodora du meilleur film aux Venice Days de la Mostra de Venise 2018. Il était présenté en compétition aux Arcs Film Festival. et a remporté plusieurs prix : la flèche de cristal, le prix du jury presse. Bouli Lanners rafle le prix d’interprétation masculine et sa réalisatrice Claire Burger  le prix Femmes de Cinéma.

C’est ça l’amour de Claire Burger sortira en France le 27 mars 2019.

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