Proxima

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Une astronaute se prépare à partir dans l’espace. Ainsi débute (bien) Proxima d’Alice Winocour qui s’englue dans des clichés sur la maternité. Honteux !

Plus mère qu’astronaute

Il va bien falloir que les réalisatrices, les scénaristes, les productrices, arrêtent de culpabiliser les femmes de leur ambition en présupposant qu’elles ne peuvent pas être à la fois de bonnes mères ET de vraies professionnelles. La société entière le prouve : les femmes sont capables de grandes choses sans être constamment entravées par les relations qu’elles ont avec leurs enfants.

Proxima d'Alice Winoncour- cine-woman
Sarah (Eva Green) suit un entrainement de dingue pour aller dans l’espace

Pourquoi avoir fait de Sarah, cette scientifique qui s’apprête à partir dans l’espace, une mère parfaite mais une professionnelle imparfaite ? Cette diplômée bac +15  a tellement peu le sens des responsabilités qu’elle est capable de mettre en danger une mission spatiale pour répondre à la promesse faite à une gamine de 8 ans ? Qui fait ça dans la vie ? Quelle femme est suffisamment irresponsable pour mettre en péril ce qu’elle attend depuis l’enfance et gâcher tous ces efforts juste pour faire plaisir à sa fille ? Pour répondre à un caprice ?

Les femmes et la science

Qu’un film traite enfin de la préparation d’une femme à une mission spatiale était absolument passionnant. Enfin, on saurait ce que peut avoir de spécifique son regard, son apport dans ses relations avec ses collègues, avec l’autorité, avec sa biologie, avec ses capacités physiques ou ses atouts propres. Enfin, on saurait, on comprendrait ce que les femmes peuvent apporter à la conquête des l’espace, ce qui les fascine dans l’étude de l’univers et quelle est leur contribution à l’histoire scientifique du monde.

Proxima d'Alice Winoncour- cine-woman
Sarah (Eva Green) et un de ses collègues (Matt Dillon) qui lui n’a pas de problèmes à ne pas avoir ses enfants pendant sa préparation

Le sujet a si peu été exploré qu’il n’y a que l’embarras du choix des sujets pour le nourrir. Et quand un homme américain traite d’un tel sujet, dans les Figures de l’ombre par exemple, s’il replace ces scientifiques dans leur contexte familial, il les valorise en expliquant ce qu’elles ont apporté à la conquête spatiale, malgré les obstacles mis sur leur route.

Proxima ou le syndrome de la mère parfaite

Dans le cinéma français, non. On parle d’une scientifique de très haut vol en expliquant sa vocation par sa seule passion enfantine pour les étoiles. On ne fait jamais aucune allusion à son parcours (forcément compliqué) pour parvenir au top niveau. En revanche, le bonheur qu’elle a à être mère devient forcément sa priorité.

Et surtout le film s’attarde sur toutes les fautes professionnelles qu’elle est capable de faire juste pour faire plaisir à sa fille : l’emmener dans une zone en quarantaine, l’inviter à une réunion d’où la petite va forcément s’enfuir et ultime prouesse, défier tous les systèmes de sécurité pour qu’elle puisse voir la fusée.

Bien pensance humiliante

C’est grotesque ! Cette vision tellement humiliante et fausse du  comportement des femmes dans la sphère professionnelle relègue tous les atouts du film au second plan. On se croirait revenu à une époque qui n’a d’ailleurs jamais existé. Quand l’épanouissement d’une femme cultivée et éduquée ne passait finalement que par la maternité. Tellement rance…

D’Alice Winocour, avec Eva Green, Zélie Boulant-Lemesle, Matt Dillon, Sandra Hüller…

2019 – France- 1h46

Proxima d’Alice Winocour est en sélection officielle au 28e Festival du film de Sarlat. Sortie le 27 novembre.

© 2019 DHARAMSALA – DARIUS FILMS – PATHÉ FILMS – FRANCE 3 CINÉMA
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