Les Tops 5 d’Antony Cordier

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Les femmes et le 7ème art, c’est une longue histoire mal connue. Pour l’honorer, Cine-Woman demande à tou(te)s les 5 films de femmes et les 5 rôles féminins qui les ont marqués. Antony Cordier, le réalisateur de Gaspard va au mariage, en salle le 31 janvier 2018,  nous a confié ses listes.

Les choix d’Antony Cordier

Découvrir le cinéma d’Antony Cordier est une chouette expérience. Lire ce qu’il dit de ses films et de ses inspirations révèle un véritable puits de science, de réflexions, de références culturelles variées et d’explications judicieuses. On ne saurait trop vous conseiller de lire l’excellente interview du dossier  de presse – ce que Cine-Woman ne recommande jamais – pour mieux cerner le personnage et sa démarche. Même si c’est évidemment Gaspard va au mariage, sa comédie mélancolique, qui nous a donné envie d’en savoir plus sur lui.

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Antony Cordier, le réalisateur de Gaspard va au mariage

Antony Cordier a grandi à Tours dans une famille qui n’était pas cinéphile mais dans laquelle le cinéma était valorisé comme un art populaire. « Nous allions au cinéma une ou deux fois par an, généralement à la fin du mois d’octobre », se souvient-il. « A l’époque j’étais fan de Belmondo, j’attendais la sortie de son film annuel avec tellement d’impatience que j’arrivais toujours le premier dans la salle ».

Fan de Bebel

Bébel, Antony Cordier l’a d’abord découvert sur petit écran. « Mon frère et moi partagions la même chambre et nous avions la chance d’avoir la télévision au pied de notre lit. Regarder la télévision, c’était ce qui nous permettait de ne pas dormir… et de découvrir le Ciné-Club de Claude-Jean Philippe« . Il commence alors à découper tout ce qu’il peut lire sur les films, à constituer des fiches et à fréquenter à haute dose Le Studio, le cinéma d’art et d’essai de Tours dont il salue encore le dynamisme et la qualité de la programmation.

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Jean-Paul Belmondo dans le Casse d’Henri Verneuil

« C’est là que j’ai découvert que Jean-Paul Belmondo, avant d’être Le Magnifique, avait été Le Cerveau, L’Homme de Rio, Pierrot le fou« … ou Le Casse d’Henri Verneuil, un de ses films préférés. Mais, comment passe-t-on de fan de Bébel à réalisateur? « En étant bon élève, répond Antony Cordier. Toutes mes rédactions transpiraient le cinéma, je citais tellement de films que ma prof de français de Seconde m’a parlé de la Femis et du concours pour y rentrer. Evidemment, je ne connaissais rien, ni personne. Je filmais mes amis en empruntant la caméra du lycée en oubliant parfois de la rendre ».

Un parcours sans faute

Le bac en poche, il choisit judicieusement ses options d’hypokhâgne pour se rapprocher de Paris, de la Femis et du cinéma. Il décroche une maitrise de philosophie en étudiant l’esthétique du cinéma de Jean-Luc Godard, puis tente le concours de la Femis qu’il réussit au deuxième essai, en section montage. « L’intérêt de l’école est de nous faire travailler à tous les postes en constituant une équipe avec les étudiants de la même promotion », remarque-t-il. C’est dans ce contexte qu’il réalise son film de fin d’études, Beau comme un camion, un documentaire sur sa famille qui reçoit le prix spécial du jury au Festival du court-métrage de Clermont-Ferrand en 2000 et dans plusieurs autres festivals internationaux.

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Happy few d’Antony Cordier

Antony Cordier peut alors passer à la fiction. Douches froides, son premier long métrage, reçoit le Prix Louis Delluc du premier film en 2005 et est sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes, Happy Few est en compétition à la Mostra de Venise en 2010, tandis que Gaspard va au mariage sort en salle le mercredi 31 janvier 2018.

Des femmes aux avant-postes

Sinon, Antony Cordier tient à préciser qu’il entend les équipes qui travaillent avec lui… mixtes. Vraiment ?  « Pour Gaspard va au mariage, il y a eu plus de chefs de poste femmes que d’hommes, notamment dans des domaines où elles sont habituellement peu nombreuses », reconnait-il. « J’y tiens absolument car l’atmosphère de travail est toujours meilleure quand les équipes sont réellement mixtes et aux postes importants. Personnellement je m’entends toujours mieux avec les femmes. Rien de pire que de se retrouver entre mecs ».

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Les femmes au centre du film Gaspard va au mariage d’Antony Cordier, ici Marina Foïs et Christa Theret

Citons donc les scénaristes Julie Peyr et Nathalie Najem, les directrices de production Marie-Frédérique Loriot-dit-Prévost et Anaïs Ascaride, la directrice de casting Aurélie Guichard, la chef décoratrice Julia Lemaire, l’ensemblière Virginie Destiné, la cadreuse Julia Mingo, l’assistante de réalisation Ariel Sctrick, la scripte Céline Savoldelli, la perchwoman Marie Mougel, la chef monteuse Christel Dewynter ou encore la mixeuse Mélissa Petitjean

Mes cinq films réalisés par des femmes préférés

1) Naissance et maternité de Naomi Kawase (2006)

Je ne connais pas de film qui soit à la fois aussi cru et aussi doux.

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Naissance et maternité de Naomi Kawase

Et il y a cette scène où Naomi Kawase filme son bébé alors qu’il vient juste de sortir de son ventre… J’admire la force de Kawase. Et le fait qu’elle filme comme elle respire.

2) Les Sentiments de Noémie Lvovsky (2003)

Concrètement, le film commence comme La Femme d’à côté et il se termine comme Hôtel des Amériques.

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Melvil Poupaud, Isabelle Carré, Nathalie Baye et Jean-Pierre Bacri dans Les Sentiments de Noémie Lvovsky

C’est un modèle d’intelligence dans l’écriture et le choix des acteurs. C’est un film profondément émouvant et d’un équilibre parfait. Je le revois souvent. Une autre de ses qualités que j’apprécie : c’est un film grand public.

3) Old Joy de Kelly Reichardt (2006)

Encore une réalisatrice, comme Kawase, qui fait un cinéma radical mais dans un geste doux, presque feutré.

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Will Oldham et Daniel London dans Old Joy de Kelly Reichardt

C’est d’une grande maîtrise et d’une grande liberté. On ne sent pas la volonté de plaire à tout prix. C’est à la fois très réaliste, très net, on « sent » les choses, on y est, et en même temps il y a quelque chose de poétique et de déchirant qui sourd de tous les plans.

4) Demain et encore demain de Dominique Cabrera (1997)

C’est un de mes films qui m’a donné la force de me lancer.

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Demain et encore demain de Dominique Cabrera

Un film qui prouvait qu’on pouvait filmer tout en pleurant, se filmer soi-même sans faire de concession.

5) Les Ogres de Léa Fehner (2015)

L’année dernière, en 2016, ce film aurait dû être au Festival de Cannes, gagner des César et faire le bonheur des gens partout. Ça prouve que la vie est mal faite et que certaines personnes ne sont pas au bon endroit.

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Adèle Haenel dans Les Ogres de Lea Fehner

Je retiens de ce film la beauté qu’il va puiser dans la vitalité, et la gêne qu’il est capable de créer dans certaines séquences.

Les cinq rôles d’actrices au cinéma qui m’ont ébloui

1) Sigourney Weaver dans Alien de Ridley Scott (1979)

Je trouve remarquable qu’on ait choisi ce type d’actrice d’1m82 pour faire un film sur la peur du viol.

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Sigourney Weaver dans Alien, le huitième passager

La classe de Sigourney Weaver, son jeu parfois ironique parfois intense… Elle est sans rivale.

2) Isabelle Adjani dans Possession d’Andrzej Zulawski (1981)

Cette intensité dans le jeu a disparu en France. Elle joue qu’elle a quelque chose à l’intérieur d’elle, et ce n’est jamais ridicule, ça impressionne.

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Isabelle Adjani et Sam Neill dans Possession

Qu’elle puisse la même année enchaîner ce film et Clara et les chics types, ça donne une idée du phénomène.

3) Kim Min-he et Kim Tae-ri dans Mademoiselle de Park Chan-wook (2016)

Elles brillent parce qu’elles sont partenaires, qu’elles s’appuient l’une sur l’autre jusqu’à jouer quelquefois la partition de l’autre, et que leur engagement est total.

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Kim Tae-Ri et Min-Hee Kim dans Mademoiselle

Si vous n’êtes pas à ce degré d’engagement dans les scènes érotiques, alors ça peut être pathétique. Là c’est à la fois beau et drôle.

4) Jennifer Lawrence dans Joy de David O.Russel (2015)

Pourquoi le cinéma américain sort-il aussi souvent de grandes actrices ? On sent qu’elles ne sont pas là par hasard. Souvent les filles savent qu’elles veulent être actrices dès l’enfance.

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Jennifer Lawrence dans Joy

Pour les garçons, le désir de cinéma est plus vague. Jennifer Lawrence est un spectacle à elle toute seule, dans son visage, sa silhouette, sa voix, le rapport entre les trois. Elle emmène le film et nous on cavale derrière.

5) Greta Gerwig dans Frances Ha de Noah Baumbach (2012)

Quand elle surgit on se dit « Tiens, on n’a jamais vu ça, cette intelligence burlesque dans ce charme-là… » Avec elle, on n’est jamais sûr de rien, on ne sait pas si elle est gracieuse ou pataude, rayonnante ou névrosée, jolie ou quelconque. Du coup tout devient dynamique.

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Greta Gerwig dans Frances Ha

La seule chose dont on est sûr, c’est qu’elle est de sa génération, qu’elle est totalement contemporaine. C’est le genre d’actrice dont la personnalité unique vient ré-écrire le film – d’ailleurs elle est souvent scénariste des films dans lesquels elle joue.

© Claire V. – Le Pacte – Agat films/ Jeannick Gravelines – Sento Inc. – ARP Sélection – Epicentre Films – Pyramide Distribution – UFD – The Jokers / Bac Films – 2015 Twentieth Century Fox – RT Features.

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