D’une pierre, deux coups

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Que sait-on de la vie de nos parents? Rien que ce qui nous concerne, répond Fejria Deliba dans D’une pierre, deux coups un premier film touchant.

Secrets de mère

Zayane est une vieille dame très digne. Elle a consciencieusement élevé ses 11 enfants et reste à leur disposition dès qu’ils ont besoin, et certains ont souvent besoin.

Milouda Chaqiq dans D'une pierre deux coups
Milouda Chaqiq (Zayane)

Même si ce n’est pas une famille ou l’on se confie beaucoup, intimement en tous cas, Zayane semble transparente. D’ailleurs, les uns et les autres ont gardé l’habitude d’entrer chez elle presque comme chez eux. C’est à peine s’ils donnent la peine de sonner. Et le frigo est une sorte d’open-bar où tout le monde se sert, imposant même ses menus! Un jour, Zayane reçoit une lettre. Une lettre ou une révélation?

D’une pierre, deux coups ou la révélation de vies parallèles

Le film se poursuit alors en montage parallèle. D’une part, Zayane répond à cette lettre en allant à la rencontre de celle qui la lui a écrite, accompagnée d’une de ses filles. De l’autre, au même moment, tous ses enfants ont rendez-vous chez elle pour un dîner familial. Dans l’un comme dans l’autre cas, les bouches vont commencer à s’ouvrir, les secrets à se révéler.

Brigitte Rouan et Milouda Chaqiq dans D'une pierre, deux coups
Brigitte Rouan (Amel) et Milouda Chaqiq (Zayane)

On reproche souvent aux films d’être trop explicites, trop explicatifs. Celui-là ne l’est pas assez, du moins dans sa seconde partie. L’histoire est certes limpide, fort bien tenue quand elle est racontée du point de vue de la mère. C’est moins le cas en ce qui concerne les enfants, les réactions des uns et des autres sont mal élucidées.

En suspens

En premier lieu, cette réunion qui n’est annoncée à aucun moment du film ( au contraire) a-t-elle lieu chaque semaine ou est-elle exceptionnelle puisqu’un frère n’a pas vu les autres depuis 4 ans ? (Est-ce important puisque tout le monde le lui fait remarquer ou est-ce juste pour signifier que chacun vit sa vie?) Pourquoi l’aîné réagit-il si brutalement aux hypothèses de sa sœur? Qu’est-ce que la révélation de ce secret, de ces secrets va changer dans leur famille?

La fratie presqu'au complet d'Une pierre, deux coups
La fratie presqu’au complet d’Une pierre, deux coups

Comme le film reste comme en suspens sur toutes ces questions-là, on se demande quelles étaient les intentions de la réalisatrice, Fejria Deliba, qui fait une apparition à la toute fin. Voulait-elle parler des secrets de famille sans en révéler les conséquences? Montrer que la soumission des femmes algériennes de cette première génération immigrée n’est qu’apparente? Que famille unie de ne veut pas dire destins identiques ou pensée unique? Tous ces thèmes sont effleurés, aucun n’est abordé de front. C’est dommage mais prometteur, car l’écriture reste légère, le propos intéressant, la direction d’acteurs juste et efficace.

Un portrait de femme fort

D’une pierre, deux coups reste un portrait de femme très sensible, de celle que sur lequel le cinéma s’attarde peu : une mère de 75 ans, algérienne, analphabète et qu’interprète avec force la slameuse Tata Milouda.

De Fejria Deliba, avec Milouda Chaqiq, Brigitte Roüan, Claire Wauthion, Zinedine Soualem, Samir Guesmi…

2015 – France – 1h23

D’une pierre, deux coups de Fejria Deliba est lauréat 2013 de la Fondation Gan et a reçu le prix du public au festival Premiers plans d’Angers 2016.

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